Les défis économiques de Tebboune: Scénarios et préalables…

Réduire la part des hydrocarbures dans l’économie nationale à moins 20%.

Ce serait réalisable d’ici 2021, souligne le président Tebboune lors d’une rencontre avec la presse nationale. C’est un pari et un défi tout à fait réalisable à mon avis, contrairement à ce que pensent beaucoup.

 

Le président de la république veut donc en faire désormais, les futurs acteurs de cette nouvelle stratégie : les mines, l’agriculture et les finances.

Il compte premièrement sur les vastes ressources minières dont regorge le pays curieusement inexploitées qui pourraient constituer une substitution aux gaz et pétrole.

Le second secteur sur lequel il compte c’est l’agriculture avec ses potentialités prouvées et un niveau de performance prometteur surtout au sud du pays.

La tendance pourrait même être inversée,de l’importation à l’exportation de produits agricoles, en ayant assuré une autosuffisance alimentaire du pays.

Enfin, le dernier secteur sur lequel il compte dans sa stratégie ce sont les finances qui doivent connaitre dans le scénario du président une profonde réforme pour conduire une politique de financement optimisée afin d’assurer une meilleure performance de l’économie nationale.

 

Effectivement, le pari du président est tout à fait réalisable, néanmoins il a besoin de réunir un certain nombre de préalables :

En premier lieu éviter un phénomène connu sous le nom de « malédiction des ressources » ou de « paradoxe de l’abondance ».

La malédiction des ressources a été définie « comme le phénomène voulant qu’un pays disposant d’un secteur des ressources naturelles tourné vers l’exportation, qui génère d’importantes recettes pour l’État, se retrouve paradoxalement en situation de stagnation économique et d’instabilité politique ».

 

Dans de nombreux pays en développement, plutôt que de devenir une source de croissance économique, l’abondance de ressources naturelles a été associée à une stagnation de la croissance dûe à cette « malédiction des ressources ».

 

D’après Conceição, Fuentes et Levine, la capacité d’un pays en développement à surmonter la malédiction des ressources est subordonnée à deux conditions préalables : éviter les conflits et renforcer ses institutions nationales.

 

Selon ces auteurs, les pays en développement doivent gérer efficacement leur richesse en ressources naturelles en améliorant la gouvernance et le cadre institutionnel, en évitant le « syndrome hollandais » et en minimisant les effets de la volatilité des prix.

 

Il est essentiel d’améliorer la gouvernance et le cadre institutionnel dans la mesure où ditsent ils « l’efficacité de toutes les politiques visant à gérer le risque associé aux ressources naturelles nécessite un cadre institutionnel fort ».

 

Outre de solides mécanismes de gouvernance et un cadre institutionnel adapté, un autre élément important pour lutter contre la malédiction des ressources est la capacité d’un pays à éviter ce qu’on appelle « le syndrome hollandais ».

Frankel explique : « Ce syndrome fait référence à certains effets secondaires potentiellement néfastes d’une montée en flèche des exportations de pétrole ou d’autres produits minéraux ou agricoles, parmi lesquels une forte appréciation réelle de la monnaie, une augmentation des dépenses, une augmentation du prix des biens ne faisant pas l’objet d’échanges internationaux, avec pour résultat un transfert de main-d’œuvre et de terres au détriment des produits non destinés à l’exportation, et un déficit de la balance courante ».

 

D’après Sachs et Warner, le syndrome hollandais peut être évité si les revenus tirés de la vente des ressources naturelles sont investis dans des projets qui améliorent la productivité de l’ensemble de l’économie.

La faculté d’un pays à vaincre la malédiction des ressources dépend aussi de sa capacité à réduire au minimum les effets de la volatilité des prix des produits de base.

 

Les prix du pétrole, du gaz naturel, de l’or et d’autres produits de base sont extrêmement volatiles, ce qui peut évidemment poser des problèmes pour les pays qui dépendent des ressources naturelles.

En ce sens, précisent Conceição, Fuentes et Levine, «la volatilité des prix est préjudiciable car les gains obtenus en période de boom ne compensent pas les pertes résultant des effondrements de prix. »

 

Les décisions prises par les pouvoirs publics concernant les investissements liés aux revenus tirés des ressources naturelles sont déterminantes pour échapper à la malédiction.

A ce sujet disent ils : « un pays qui tire parti des ressources naturelles dont il dispose obtiendra des résultats durables s’il investit les revenus tirés de la vente de produits minéraux et d’autres produits de base(non renouvelables) dans d’autres types de capital : humain, physique ou institutionnel ».

 

Un autre préalable pour réussir le pari pris par le président Tebboune c’est la nécessité de se connecter aux marchés mondiaux par différents acteurs et parties prenantes dans un éventail de chaînes de valeur d’activités économiques et commerciales.

 

Des  efforts pourraient être considérés comme faisant partie des voies de développement des CVM ( Chaine de valeurs ajoutées ) si elles sont élaborées au titre de l’initiative de la CNUCED sur les CVM et le développement.

Selon l’intégration d’un pays dans les CVM et sa teneur en valeur ajoutée locale, six voies conceptuelles de développement possibles sont identifiées : l’engagement, la préparation, l’entrée en concurrence, la conversion, le bond en avant et l’amélioration.

Ces six voies conceptuelles de développement indiquent comment les acteurs d’une CVM pourraient évoluer avec souplesse, pas seulement en termes «d’amélioration »(qui indique plus d’intégration dans les CVM s’appuyant sur la teneur en valeur ajoutée étrangère) mais aussi sur d’autres voies possibles en développant la gouvernance pour créer de la valeur ajoutée.

 

Pour relever son défi, le président doit à mon avis, compter aussi,sur un quatrième secteur, et non des moindre en l’occurrence, le tourisme qui peut générer une valeur ajoutée considérable,au vu des potentialités énormes dont dispose le pays.

 

Enfin, pour réussir son pari le président doit avant tout, mobiliser une cheville ouvrière constituée de technocrates hautement qualifiés disposant des connaissances appropriées en matière de politique macroéconomique dans les quatre secteurs, en rejoutant bien entendu le tourisme.

En tenant compte de tous ces préalables, le pari du président Tebboune sera donc tout à fait réalisable.

A bon entendeur…

Docteur Rafik Alloui

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