Une année de hirak: Approche académique pour comprendre l’enjeu

Le mouvement populaire continue sur sa lancée en bouclant en ce 53 -ème vendredi sa première année de revendication pacifique pour une Algérie nouvelle libre et démocratique.

 

Il a été difficile pour nombre d’observateurs de comprendre tous les tenants et les aboutissants de la  dynamique horizontale de ce mouvement populaire pacifique et inédit jamais égalé dans le monde, et à  son rejet de s’adosser à des instances ou à un leadership représentatif, malgré moults tentatives venant de l’intérieur et de l’extérieur.

Si par définition une crise politique est une rupture entre gouvernants et gouvernés, le maintien de ce mouvement populaire comme une immense vague de contestation sans leadership, ni acteurs médiateurs est un avantage.

Il s’agit d’un avantage dans la mesure où il traduit la leçon apprise à la suite de la crise de 2001.

En effet, au début de cette crise le pacifisme était de mise, mais malheureusement un tournant dramatique s’en est suivi par la faute d’une récupération double : du pouvoir et de leaderships animés de visées politiques qui étaient les leurs, loin des protestataires qui ne revendiquaient que leurs droits identitaires.

Si cette absence de représentation peut permettre aux tenants du pouvoir politique de créer ou de privilégier l’émergence de représentants dociles, cette stratégie risque, d’aggraver la crise de confiance qui est tellement grande,  dûe à des erreurs stratégiques commises par le pouvoir qui était en place.

Le Hirak est donc déterminé à continuer son mouvement pacifique horizontal et rejette toutes formes de récupération que ce soit du pouvoir ou de pseudos proclamés leaders surtout de l’extérieur :

quelle est la solution pour désamorcer cette crise ?

Une transition par le bas,nous le répétons encore une fois est la solution scientifique : En 1996, Juan Linz, explique dans un ouvrage collectif qu’il a dirigé avec son camarade Alfred Stepan« Problems of Democratic Transition and Consolidation » qu’à travers l’étude de quatorze cas différents de pays qui ont connu des expériences de transition démocratiques, les auteurs ont fini par poser un nouveau paradigme d’analyse, toujours axé sur le jeu des acteurs de la transition, mais opérants sur cinq espaces nouveaux dans l’analyse de la transition qui regroupent l’ensemble des acteurs représentant le hirak .

Toutes les parties concernées par les cinq espaces doivent être encouragées par le pouvoir actuel (La légitimité bureaucratique de l’État ne doit pas être remise en question afin d’avoir une transition stable), à engager dès maintenant un dialogue chacun de son côté pour arrêter des propositions concrètes afin d’assurer les conditions de réussite d’une transition pour passer à une nouvelle Algérie libre et démocratique :

– Le premier espace est la société politique. Il s’agit des acteurs qui ont l’ambition de conquérir le pouvoir. Elle se doit d’être renforcée afin d’avoir une transition ordonnée et consensuelle.
– Le deuxième est la société civile qui regroupe les acteurs inédits tels que les associations des droits de l’Homme, les syndicats, les ordres corporatistes ou les acteurs religieux, les étudiants
– Le troisième est le concept de l’État de droit. Il s’agit principalement des règles qui vont régir le nouveau jeu politique post-autoritaire. (La constitution, la loi électorale et les textes d’applications)
– Le quatrième est l’État lui-même qui regroupe quelques acteurs qui peuvent nuire ou aider les autres acteurs de la transition (L’accompagnement de l’armée ou les forces de l’ordre.)
– Le cinquième est la société économique qui regroupe l’ensemble des structures, privées ou étatiques qui ont la mission d’assurer le lien entre les politiques des dirigeants des périodes transitoires et les attentes populaires. (Les patronats étatiques et privés).

C’est ce paradigme d’analyse qui a primé sur la plupart des analyses faites depuis le milieu des années 90.

Au terme de ce dialogue engagé par l’ensemble de ces acteurs, une conférence nationale doit être organisée pour sortir avec un consensus national sur une feuille de route vers une Algérie nouvelle libre et démocratique, principale revendication du Hirak.

Il ne peut y avoir à mon avis d’autre solution que celle-ci, car issue d’une étude scientifique qui a aidé bien des pays à passer d’un régime autoritariste à un régime démocratique.

A bon entendeur

Docteur Rafik Alloui

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